Œuvre

Límite

Légende

2010
Photographie numérique/ impression jet d’encre
2m x 3m
1/3

Artiste

Par

Texte

Cadre : Une fille. Une piste. Une jungle, très verte. Des pierres, bien grandes. De jour.

Elle bloque la route.

Elle apporte la dernière touche.

Elle débloque la route.

Elle se bat pour ses convictions.

Elle finit son monument.

Elle s’étire un moment.

Elle est prête à bondir.

Elle montre un peu ses jambes.

Elle se défait les cheveux au vent.

Elle marque cette piste comme étant sa toute préférée.

Elle est en tout point indifférente à la route, qui n’a strictement rien de particulier.

Elle met les mains où on peut les voir.

Elle refuse de montrer son visage.

Elle prend acte de sa faiblesse.

Elle est sûre de ses forces.

Elle rend la pierre pierreuse.

Elle est rigoureusement libre, libre de faire ce qui lui plaît.

Elle pousse, fort.

Elle tire, doucement.

Elle rêve de la route libre.

Elle comprend qu’il pourrait être plus facile de contourner.

Elle essaie désespérément de se retenir, cède et murmure « parcours rocailleux ».

Elle fait un avec la jungle qui l’entoure, la pierre contre la peau douce de sa main.

Elle est Sisyphe.

Elle sait possible qu’elle ne parvienne jamais à déplacer la pierre.

Elle se repose du labeur d’avoir poussé toutes ces pierres.

Elle est heureuse d’être là, de pousser la pierre.

Elle repense à Camus, « Chacun des grains de cette pierre, chaque éclat minéral de cette montagne pleine de nuit, à lui seul, forme un monde. La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un cœur d’homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux. »

Elle pense que cela suffit aussi à combler un cœur de femme.

Elle est heureuse.

Traduit de l’anglais par Martin Richet