Œuvre

Feeling

Légende

2009
Vidéo HD / HD video
3 min. 33 sec.
Courtesy Galerie Perrotin, Hong Kong & Paris

Artiste

Par

Texte

Quelqu’un danse devant un tableau.

Il est vêtu simplement, en chemise blanche et pantalon noir, comme le tableau, croix noire sur fond blanc. Parfois vie et beauté sont des choses simples : voir danser quelqu’un devant un tableau est beau, et le cœur rentre lui aussi dans la danse.

Ce quelqu’un, c’est l’artiste Ivan Argote, et c’est devant la Croix Noire de Malevitch qu’il danse.

Le geste d’Ivan peut être vu comme un prolongement du tableau, le tableau atteignant ainsi le monde réel, le monde réel des sensations et des émotions, de la joie quotidienne, comme si un personnage de Dostoïevski sortait de son livre pour nous proposer une boule de glace.

Ou alors il s’agit d’un commentaire, d’une réaction, d’un geste opposé aux abstractions de l’art du 20ème siècle et à son silence glacé et hermétique. Les cuivres de la chanson que l’on entend, qui guide le corps d’Ivan, évoquent les marches funèbres de la Nouvelle Orléans.

 

La petite radio qu’il a réussi à faire entrer au musée invoque les mannes d’une chanson de The Cure, « Close to Me ». Hasard ou fatalité, c’est une parfaite collaboratrice.

Le petit poste de radio a pour parallèle à droite une petite Croix Noire de Malevitch.
Monde et vidéo admettent d’amusantes coïncidences.

La tension monte à chaque fois que l’on voit quelqu’un à gauche, passer à l’extérieur ou bien près de l’entrée. Nous craignons l’interférence du dehors – ce dehors qui apporte la musique nécessaire à ce moment pourrait aussi se matérialiser pour anéantir la rêverie de l’artiste – mais cette peur s’estompe : les gens se rendent évidemment, respectueusement, aux particularités de leurs propres vies, et nous restons au plus près d’Ivan et de tout ce qu’il fait : danser, performer, jouer, vivre, aimer, attaquer, plaisanter, rêver.

 

Traduit de l’anglais par Martin Richet